dimanche 13 janvier 2013

Jésus, Cassandre et Les Demoiselles/ Druide

                                

Résumé de l'éditeur: Jésus, Cassandre et les Demoiselles, quarante nouvelles, une galerie de personnages, une suite d'incidents grossis à la loupe et un fil conducteur les éclaboussures provoquées par les blessures de l'enfance. Quarante nouvelles, dix cercles fermés où s'entrechoquent plusieurs visions d'un même début de vie chaotique.

L'auteur :
Emmanuelle Cornu, montréalaise de naissance et d'adoption, enseigne à la maternelle depuis 13 ans. À l'aube et au crépuscule, entourée de sa femme et de ses chats, la prof cède la place à l'écrivain, histoire de se trouver... et de se retrouver. Jésus, Cassandre et les Demoisellesn'est que son premier livre... heureusement pour nous !

Critique: 

Indéniablement, le livre est beau. La peinture de Jacque Payette à l'encaustique donne une profondeur à la première de couverture qui est incroyable. Profondeur qui malheureusement ne se retrouve pas complètement dans ce recueil de nouvelles.  Ce n'est pas que je n'ai pas aimé le livre, mais plus qu'il m'a déçu.

Le contrat de lecture avec la première de couverture et le titre me faisait espérer quelque chose de dérangeant, un univers qui porte un malaise au lecteur, une certaine tristesse, mais non, rien de tout ça. 
Les trois noms du titre ne se retrouvent que dans trois nouvelles et tour à tour dans les 10 parties de l'oeuvre. Et c'est tout ce qui se qui unit les quarante nouvelles entre-elles. Le recueil est séparé en  dix  sous parties qui possèdent chacune quatre nouvelles.  

Je mets en doute l'utilité de ces parties qui ne semblent être faites que pour justifier le titre qui lui justifie le lien entre toutes les nouvelles par son énumération.
La sous partie étant nommé avec le personnage de la première nouvelle et une partie du titre. 

Par exemple, la deuxième partie qui se nomme: Eluda-Louisiana et les Demoiselles commence avec une nouvelle mettant en scène un personnage du nom de Eluda-Louisiana avec la quelle se rajoute la partie du titre  Les Demoiselles

Je me suis donc vraiment demandé l'utilité de ces séparations que, pour la plupart, je sautais rapidement, n'apportant rien au discours de l'oeuvre. Une autre disposition aurait permit d'expurger certaines nouvelles qui me semblaient plus faibles et de resserrer le recueil dans un univers bien net. 
Plus petit, ce premier recueil de nouvel de l'auteur aurait laissé moins voir certains tics d'écriture qui m'ont été fatigants à la longue.
Par exemple le fait de toujours répéter le sujet de la nouvelle pour faire avancer la diégèse.

« Manon aime Cassandre. Cassandre est une bonne cliente. Cassandre écoute, Cassandre ne parle pas, Cassandre ne bouge pas, Cassandre ne rouspète pas, Cassandre est polie, Cassandre sourit, Cassandre garde les mains croisées, Cassandre sait être une grande fille. » (p.19) 

« Marianne, Marie-Ève et Marielle partent guerre. Elles ont brulé le drapeau blanc. La fureur les ronge, la violence les submerge. Tout est à recommencer. [...] Marianne, Marie-Ève et Marielle fourbissent leurs armes, aiguisent leurs couteaux. Branle-bas de combat. Les intimités refont surface. La cible ennemie est facile à atteindre. [...] Marianne, Marie-Ève et Marielle le savent, il y aura de nouvelles règles. Du sang neuf. Un vent de changement. Des promotions. » (p.85)

Cette répétition pourrait s'excuser par l'emploi d'un narrateur hétérodiégétique pour le plus souvent des histoires, mais il arrive parfois que cette répétition se retrouve dans les nouvelles, qui sont rares, à narration homodiégétique: 

« J'ai un bureau qui brille. Mes mains y sont posées. Elles sont belles. J'ai le souci de l'esthétisme. Mon bureau est grand. J'aime le caresser. Mes bagues ne le griffent pas. Mon bureau est lisse. Mes ongles sont bien vernis. Mon bureau aussi. » (p.157)

Agissant presque comme un mantra, cette répétition me faisait oublier tout le reste de l'histoire et je ne voyais que le sujet qui souvent n'apportait pas grand-chose dans son emphase. Cependant, quand les répétitions étaient absentes, ou très espacées, je découvrais une écriture intriquante dans des univers naïfs et amusants. Comme dans une nouvelle où une organisation posent, durant la nuit, des mangeoires sur les balcons des 42 deux bâtiments d'une rue. 

 La meilleure nouvelle du recueil reste pour moi celle toute simple du nom de Madame qui est dépourvue de cette figure de style emphatique: 

« Madame l'entrevoir dans la noirceur. S'avance doucement. Dépose ses paquets. Entend sa respiration. Se penche. Touche sa peau. Retire sa main. L'essuie sur son pantalon. Prend son cellulaire. Compose le 911. Hésite. N'appuie pas sur la touche «enter». Dirige la lumière de son téléphone vers la jeune femme.  Promène le faisceau sur son corps. » (p.25) 

Cependant, je reconnais aussi qu’à certains moments, les répétitions sont bien incluses, et ajoutent aux nouvelles (Reconnaître madame D. à la courbe de ses mollets et En cherchant ton bouton gris, tu as trouvé un gant de vaisselle), mais dans l'ensemble du recueil cette stylistique de Emmanuelle Cornu déconcentre.  

Ainsi, un resserrement autour de l'oeuvre aurait été bénéfique et aurait mieux accompagné le discours paratextuelle; qui est vraiment une force de cette nouvelle voie éditoriale de Druide.   

Note du critique :3/5 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire